lundi 3 avril 2017





C'est le matin.  Le soleil entre grand par les fenêtres et réchauffe le plancher du salon.  Les chats s'y font griller.  J'entends les enfants de l'école primaire tout près crier et hurler.  Je sens leur urgence de vivre la récréation, si courte.  Bientôt ils devront rentrer.  Bientôt ils devront se taire.  Se calmer.

Je me suis levée tôt.  Je suis en train de mettre mon cv à jour, j'en suis à me chercher un nouvel emploi.  Pour l'instant, ça va.  Je m'affaire tranquillement.  Je ne m'en plains pas, on pourrait presque dire que je suis motivée.  Mais je ne sais pas si cet élan va rester.  Mon humeur pivote sans avertir, dernièrement.

Un moment je suis bien, je m'occupe et m'abandonne à mon environnement, tout fonctionne et il n'y a pas de souci.  L'instant d'après je bloque, m'affole et ne reconnais plus rien des murs autour, ne sais plus rien de la marche à suivre, des gestes à poser.  Je perds pied sans même avancer.

Je peux me relever et je le fais.  Mais l'étrangeté m'étouffe.  C'est si bizarre, tellement bizarre, trop bizarre.  Le familier m'échappe, parfois.  Ça peut être anodin.  J'ai oublié où j'ai rangé mes plats.  Le papier cellophane.  Mes bas.  Des fois c'est plus alarmant.  Je ne me souviens plus par où prendre l'escalier Colbert.

C'est le matin, il fait très beau.  Peggy Sue est couchée au soleil, Ignacio regarde par la fenêtre et Capicolle se promène dans la pièce en ronchonnant.  Je tape à l'ordi et pour le moment, tout est ok.  La minute où je vais paniquer à l'idée de ne plus avoir d'argent n'est pas encore arrivée.  Je ne stresse pas trop encore en pensant aux démarches que je devrai entreprendre pour me dénicher un boulot.  Je ne me sens pas trop laissée à moi-même encore (ce ne serait qu'un sentiment, de toute façon).  Je ne suffoque pas trop déjà sous les questions, les doutes.  Pas trop, pas déjà.

C'est le matin, il est tout de même encore assez tôt.  Après tout ce que j'ai accompli, j'ai droit à une sieste, moi je dis.  Allez, je vais aller essayer de faire durer cet état.









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