lundi 9 juin 2014






J'ai finalement lu (en une seule soirée!) Les heures souterraines, roman de Delphine de Vigan qui  m'a été plusieurs fois chaudement recommandé par mes collègues et même par plusieurs clients.  Si je l'ai lu aussi rapidement, avec autant d'attention et de compassion pour les deux personnages principaux, c'est que c'est effectivement très bon.  Excellent, même.  L'écriture, l'histoire de Mathilde puis celle de Thibault, tout est touchant.  

Mathilde, elle, subit depuis plusieurs mois le comportement inacceptable de son patron envers elle.  Leur relation d'affaires a changé d'un coup et depuis il lui fait subir des misères (et je dis bien des misères)!  On parle de harcèlement moral et psychologique au travail ici, un thème très peu abordé.  Elle tient fort, elle tient longtemps, mais son patron la gruge petit à petit et rend son travail et sa vie insupportables.

Je me suis beaucoup reconnue en Thibault.  D'abord parce qu'il vit une liaison avec une femme qui ne l'aime pas, ou qui à tout le moins n'arrive pas à s'ouvrir à lui.  Chaque passage le concernant me ramenait à un souvenir précis de mon histoire à moi.  Les mots sont si bien choisis que j'aurais aimé y avoir pensé moi-même.  Je vous partage quelques extraits qui sont significatifs pour moi.

«Il n'a pas cherché à lutter, même pas au début, il s'est laissé glisser.  Il se souvient de tout et tout concorde, va dans le même sens, s'il y réfléchit le comportement de Lila indique mieux que toutes les paroles son absence d'élan, sa manière d'être là sans y être, sa position de figurante, sauf peut-être une fois ou deux où il a cru, le temps d'une nuit, que quelque chose était possible, au-delà de ce besoin obscur qu'elle avait de lui.»

- Delphine de Vigan, Les heures souterraines, JC Lattès,  p. 21


«Il a suffisamment vécu pour savoir que cela ne se renverse pas.  Lila n'est pas programmée pour tomber amoureuse de lui.  Ces choses-là sont inscrites dans la mémoire morte d'un ordinateur.  Lila ne le reconnaît pas au sens informatique du terme, exactement comme certains ordinateurs ne peuvent lire un document ou ouvrir certains disques.  Il ne rentre pas dans ses paramètres.  Dans sa configuration.»

Delphine de Vigan, Les heures souterraines, JC Lattès, p. 22


«Il avait oublié à quel point il était vulnérable.  Est-ce que c'était ça, être amoureux, ce sentiment de fragilité?  Cette peur de tout perdre, à chaque instant, pour un faux pas, une mauvaise réplique, un mot malencontrueux?  Est-ce que c'était ça, cette incertitude de soi, à quarante ans comme à vingt?  Et dans ce cas, qu'existait-il de plus pitoyable, de plus vain?

Delphine de Vigan, Les heures souterraines, JC Lattès, p.60


«Il espère lui manquer, comme ça, d'un seul coup.  Un vide vertigineux qu'elle ne pourrait ignorer.  Il espère qu'au fil des heures elle soit gagnée par le doute, qu'elle prenne peu à peu la mesure de son absence.  Il voudrait qu'elle se rende compte que jamais personne ne l'aimera comme il l'aime, par-delà les limites qu'elle impose, cette solitude fondamentale qu'elle oppose à ceux qui l'entourent mais n'évoque qu'à demi-mot.»

Delphine de Vigan, Les heures souterraines, JC Lattès, p.63


«La relation amoureuse peut-être se réduisait à ce déséquilibre : dès lors qu'on voulait quelque chose, dès lors qu'on attendait, on avait perdu.»
 
Delphine de Vigan, Les heures souterraines, JC Lattès, p.  152


«L'échec amoureux n'est ni plus ni moins qu'un calcul coincé dans les reins.  De la taille d'un grain de sable, d'un petit pois, d'une bille ou d'une balle de golf, une cristallisation de substances chimiques susceptible de provoquer une douleur forte, voire insoutenable.  Qui fnit toujours par s'éteindre.»

Delphine de Vigan, Les heures souterraines, JC Lattès, p.153-154


 Merci, Madame de Vigan.





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