dimanche 8 novembre 2020

 

Jeudi soir dernier, j'ai amené avec l'aide de ma soeur mes trois chats à la Clinique vétérinaire Vieux-Limoilou pour un rendez-vous pris il y a quelques semaines afin de leur faire subir un examen de routine (routine qui n'a pas été suivie étant donné ma situation financière précaire des dernières années et leur statut de chats d'intérieur).  Bien que rien ne m'alarmait ou m'indiquait un déclin de santé, le fait qu'ils vieillissent m'a poussée à vouloir m'assurer qu'ils ne souffraient pas en silence d'un mal invisible quelconque.  Aller chercher cette confirmation de leur bonne forme en est venu à créer en moi l'angoisse d'une fin imminente pour l'un d'eux (ou deux d'entre eux ou même les trois?!).  

Les jours précédant notre visite, j'ai tenté de me préparer, à coup de 30 secondes à la fois environ, à l'éventualité d'une maladie ou d'un départ.  Un scénario bref, que je ne devais étirer, sinon les larmes me montaient aux yeux.  Sitôt l'issue imaginaire en tête, je devais me secouer.  La perspective seule m'était insoutenable.  Comme pour ajouter à mes visions d'horreur, mon p'tit monsieur Ignacio s'est mis à vomir régulièrement environ une semaine avant la rencontre prévue.  Son estomac ne gardait rien.  Il continuait pourtant à avoir faim (et me le signifiait abondamment de façon vocale et tactile) malgré les gerbes répétitives.  Suivant la recommandation de ma soeur, qui a déjà été technicienne en santé animale, j'ai forcé le jeûne, contrôlé et rationné ce qu'il avalait pendant quelques jours.  Avec un pâté tout désigné pour les problèmes gastriques, il a commencé à régurgiter de moins en moins puis tout est rentré dans l'ordre avant l'examen.

Parfois il m'arrive de me dire que de voir mes chats adorés s'en aller ne sera pas si pire.  Mais je sais très bien que ça fera un foutu vide intolérable, surtout au début.  Ça fait douze ans qu'Ignacio est avec moi.  Ma plus longue relation avec un homme (ce fait est à la fois attendrissant et pathétique, je crois)!  Lorsque je suis chez moi, il est toujours dans mon champ de vision.  Il m'accueille à mon retour à la maison.  Tente sa chance pour des minouches quand je passe dans la cuisine.  Me colle sur le divan.  Réchauffe mes pieds la nuit.  Se couche sur mon ventre à l'occasion et s'improvise tondeuse quand je lui masse les joues et le poitrail.  Il me suit à la toilette.  Il roucoule souvent et me fait rire quand on joue et qu'il gigote comme si sa vie en dépendait.  Comment je suis sensée m'habituer à ne plus l'avoir dans les jambes, à ne plus caresser le dessus de sa tête, là où c'est le plus doux, et derrière les oreilles?  

Capicolle, elle, est arrivée en 2009.  Ça fait beaucoup d'années à l'entendre ronronner à tue-tête et à chigner contre les deux autres menous, ça.  Elle, elle a besoin de son périmètre pour être heureuse.  Sa bulle, et la mienne aussi.  Et c'est elle qui choisit quand elle veut l'envahir.  Me piétiner quand je suis couchée et attendre que je soulève les couvertures pour qu'elle puisse s'y blottir est une de ses activités favorites.  Elle aime reprendre le processus quelques fois avant de s'installer pour de bon, toujours en faisant aller son moteur à pleine puissance et en me chatouillant le visage avec ses moustaches si je ne m'exécute pas assez vite à son goût.  Ma précieuse a des tendances boulimiques et ne boit son eau que très froide, avec des glaçons, hiver comme été.  Je déteste ramasser son vomi, mais j'adore la voir «accourir» au son des glaces qui tombent dans le bol.  Si elle daigne jouer, elle le fait couchée, parce qu'à quoi bon se forcer?  Elle est très sélective avec les humains, encore plus avec les chats.  Elle ne tolère Ignacio que lorsqu'elle nécessite une séance de toilettage et qu'elle n'a pas envie de s'en charger elle-même.  Elle refuse que Peggy Sue s'approche d'elle à moins de 30 centimètres.  Je me sens choyée d'être sa préférée, mais je sais aussi que ça a à voir avec mon rôle de pourvoyeuse alimentaire.  Je vais vraiment un jour ne plus avoir à endurer son caractère?

Et puis il y a Peggy Sue.  La discrète et sauvage, celle qui craint les humains, même moi encore malgré que je l'aie accueillie chez moi il y a six ans déjà.  Elle avait besoin d'un endroit avec d'autres chats pour être bien et j'avais réussi à établir un lien avec elle au refuge Adoption Chats Sans Abri.  Sa timidité a beaucoup diminué depuis.  Elle est aussi présente que les deux autres, seulement elle garde ses distances.  Elle me suit souvent de pièce en pièce.  Dort parfois avec nous dans le lit.  Joue avec moi, à condition que je n'approche pas trop près.  Elle prend la pose pour les photos.  Vient quêter du pâté quand elle m'entend sortir une canne et des petites assiettes de l'armoire.  Sa fascination pour les orteils me fait sourire.  Elle roucoule elle aussi, souvent en passant devant Ignacio, avec qui elle adore faire des mamours.  Elle essaie parfois de bonder avec Capicolle, mais c'est peine perdue, elle ne réussira jamais à amadouer la bitch.  Je ne la force en rien, je profite des moments où c'est elle qui vient me voir, me sniffouner, m'observer, je lui fais des beaux yeux et lui parle doucement, et je crois qu'elle m'apprécie pour ça.  J'aimerais qu'elle reste à jamais.

Mes craintes par rapport à leur santé se sont dissipées au fur et à mesure que se déroulait la visite chez le vétérinaire.  Mes chats vieillissent bien.  Rien à signaler autre que de l'accumulation de tartre et un certain embonpoint pour Capicolle.  Le personnel à la clinique est sympathique, patient et professionnel.  On m'a bien expliqué ce que je devais surveiller comme signes de maladie potentielle chez les chats seniors.  Je vous recommande fortement d'aller les voir avec vos animaux!

Je sais que mes bêtes vont mourir.  Qu'ils ont vécu plus que ce qu'il leur reste à vivre.  Je ne sais pas comment je réagirai quand ils partiront.  Ça s'en vient et en même temps ça ne se peut pas, dans ma tête.  Mon espace sans eux.  

Il n'y a rien à faire d'ici là.  

Rien à dire de plus à part que : on verra rendu là.


Chats d'intérieur à contre-jour.
De gauche à droite : Capicolle, Peggy Sue et Ignacio.


Absolument.





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