dimanche 17 juin 2007

Je crois que j'aime encore plus ce texte-là. C'est un peu la suite ou un complément de l'autre. Je l'ai écrit en pleine nuit, en même pas une heure, si je me rappelle bien. Ç'a très bien coulé, comme écriture! Et je l'ai à peine retouché... Il a su faire rire certaines personnes, en tout cas!


Mais qu'est-c'est qui se passe?


Y faudrait que je dorme. Tout’suite, là. Pis c’est pas l’envie qui me manque d’arracher la ‘tite mosus de radio fatigante, avec la dispatcher qui me baragouine à tout bout d’champ où c’que les autres chars de patrouille sont rendus. Si au moins y m’avaient donné un partner, j’aurais quelqu’un avec qui jaser. Ça me tiendrait réveillé. Mais non, Lebeau, y travaille tout seul, lui. Y’est indépendant, lui. Y connaît la job, y’est capable de la faire comme du monde, sans l’aide de parsonne.

Peut-être. Mais pas aujourd’hui. Ouais, ok, ça fait vingt-cinq ans c’te année que je suis dans le service de police de la grand’ville, mais pareil. Un homme a ben le droit de se coucher tard la fin de semaine, pis de pas être en forme, un lundi matin. Au yâble l’expérience, j’ai pus mes réflexes. Ça coûte cher, ça, sur le terrain. Une distraction, ça pardonne pas. Pis là je sens que plein d’affaires me passent sous le nez, en plus.

Comme au dépanneur, tiens, de l’autre côté de la rue. Probablement le commerce le plus malpropre du quartier. Avec ses briques brun marde, ses barreaux derrière les châssis, ses néons qui blinkent même en plein jour pis sa grande cour arrière remplie de déchets pis de gréments, ça sent le recoin de deal de dope à plein nez. Le petit baveux aux cheveux huileux que je vois sortir de là, justement, lui y’a l’air malhonnête. C’est le gars du cousin de mon voisin d’en face, me semble. Bob me l’avait présenté pendant leur barbecue annuel l’an passé. Le p’tit maudit avait même pas été capable de me serrer la main pis de me regarder dans’yeux. Ça s’ra pus ben long avant qu’y soit en dedans, ce jeune-là!

Mais ce sera pas pour à matin. J’ai pas envie de m’lever de mon siège. Au moins, y m’en ont donné un pas trop cheap, un char, aujourd’hui. Y’a l’air climatisé. Avec des journées de même comme on a ce mois-ci, ça prend de l’air frette pour endurer les heures à faire de la surveillance. Ben beau les vitres ouvartes, mais y fait chaud à ce temps-ci de l’année, pis quand on roule pas, ben y’a pas trop d’air de dehors qui t’r’vole dans face!

Y’auraient pu faire le ménage, par exemple. Le dash est plein de poussière… Pis le volant est un peu crasseux. Les bancs sont confortables, au moins. J’aime ça, ceux-là en doudou. Mais ça m’aide pas à rester alerte. J’ai juste envie de baisser le siège pis de m’étendre. De me farmer les yeux…

Y faut pas! Garder les yeux rouverts. Regarder autour… Tout est bleu foncé ici d’dans. Ça change du vert du gazon qu’y a dans le parc d’en face. Y’a ça de bon avec c’te saison-ci c’te année, l’harbe pousse pis ça verdit! Les enfants peuvent jouer dehors, comme la p’tite qu’y a là là, tout’suite. Une blonde. Pareille à la fille de la dispatcher. La gardienne est pas laite en tout cas. Avec sa belle p’tite jupe courte serrée…

Pense pas à ça, Lebeau, concentre-toi là! Focus! Je pense j’vas aller me chercher un autre café au Dunkin. Pratique, c’te poste d’observation-ci, pour nos patrouilles. Direct dans le stationnement du Dunkin! Je me parke toujours vis-à-vis entre les lettres «k» pis «i», la face vers le parc. Je sais pas pourquoi, c’est mon spot. Je couvre ce qu’y a en avant de moi, pis l’église à l’autre coin, pis aussi le dépanneur à droite. L’idéal.

Quelle heure qu’y est là? Onze heures moins quart. Fait juste une demi-heure que j’ai pris mon deuxième café de la journée. J’pourrais attendre queques menutes encore…

Là les yeux me ferment solide. J’pense m’as y aller tout’suite pour le café, pis m’as me prendre un beigne en même temps, tiens. Faut juste je me lève là, pas évident quand t’as les jambes en compote comme ça… J’pense ma femme a raison, faudrait que je perde queques livres de tour de taille aussi. ‘Cré Rita, je l’ostine ben, mais dans le fond…

Mais qu’est-c’est qui se passe? Voyons, y va donc ben vite ce camion-là! Y’aura pas le temps d’arrêter à lumière! Breake, viarge! Pis le char dans l’autre lane qui vire comme un malade…

Oh shit!

BANG.

Ouais ben, ça ça réveille… Bon, faudrait ben j’appelle la dispatcher, moi là…

La journée s’annonce plus longue que j’pensais. M’as être encore pogné à faire du temps de surplus… Pis j’vas arriver en retard pour l’souper!

(Février 2006)

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